Le président gabonais, Brice Clotaire Oligui Nguema, a franchi un pas décisif vers la refondation du modèle économique du pays. Le 30 août dernier, à l’occasion de la Journée nationale de la Libération, il a annoncé la fin progressive des exportations de matières premières à l’état brut. Objectif : transformer localement les richesses, créer de l’emploi et renforcer la souveraineté économique du Gabon.
« Nous devons transformer notre bois en meubles, notre pétrole en carburant, nos minerais en alliages, notre or en bijoux, notre cacao en chocolat, notre marbre en carreaux et notre potasse en engrais », a martelé le chef de l’État, réaffirmant sa volonté de rompre avec la logique extractive héritée de l’ère post-indépendance.
Une décision stratégique
L’annonce intervient quelques semaines après la décision d’interdire, à compter de 2029, l’exportation du manganèse brut. Un signal fort adressé aux investisseurs comme aux partenaires traditionnels du Gabon, longtemps considéré comme un simple fournisseur de matières premières.
À fin mars 2025, le pays avait exporté 2,55 millions de tonnes de pétrole brut, générant des recettes à un prix moyen de 74 160 FCFA le baril. Le manganèse, deuxième pilier de l’économie, a rapporté 185,3 milliards FCFA pour 2,14 millions de tonnes exportées (+20,4 % en un an). Quant au cacao, bien que marginal, il connaît une envolée spectaculaire, avec un bond de +350 % en 2024, preuve du potentiel agricole encore sous-exploité du pays.
Un pari industriel de 10 000 milliards FCFA
Pour accompagner cette transformation, le gouvernement mise sur le Plan national de développement économique (PNDE) 2026-2030, d’un montant colossal de 10 000 milliards FCFA. Ce plan prévoit des investissements massifs dans les infrastructures énergétiques, de transport et industrielles, indispensables pour soutenir la transformation locale.
Dans une récente intervention sur Gabon 24, le ministre de l’Économie a insisté sur la nécessité de fiabiliser l’approvisionnement électrique et d’accélérer les chantiers routiers et ferroviaires pour réduire les coûts logistiques et attirer les investisseurs.
Le soutien des partenaires régionaux et internationaux
La Banque africaine de développement (BAD), dans son Rapport pays 2025 : Gabon, encourage Libreville à poursuivre le développement de la Zone économique spéciale (ZES) de Nkok, tout en accélérant la création de la zone industrielle de l’île Mandji, des zones agricoles à forte productivité (ZAP) et de pôles touristiques. Pour la BAD, la transformation locale ne sera viable que si l’État améliore le climat des affaires et attire davantage de capitaux privés.
Vers une rupture avec la « malédiction des matières premières » ?
Avec cette annonce, Oligui Nguema entend briser un cycle qui a longtemps freiné le développement du Gabon : l’exportation brute de ressources sans réelle valeur ajoutée locale. Une politique qui a certes enrichi les caisses de l’État, mais qui a peu profité aux populations.
En prônant l’industrialisation, le président place son mandat sous le sceau d’une réorientation structurelle de l’économie, avec l’ambition de faire du Gabon non plus une simple rente pétro-minière, mais un pays producteur de richesses transformées.
Le signal est clair : le Gabon de la Ve République veut en finir avec l’économie de rente pour bâtir les bases d’une souveraineté économique assumée.































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