Ce 12 août 2025, à l’issue d’un Conseil des ministres hautement symbolique, le gouvernement gabonais a adopté une ordonnance d’amnistie générale effaçant d’un trait de plume les poursuites et condamnations liées aux crises politiques récentes. Un geste fort, qui pourrait transformer le destin de Kelly Ondo Obiang, détenu depuis plus de cinq ans pour sa tentative de coup d’État du 7 janvier 2019.
Cette mesure, prise sur la base des articles 99 et 170 de la Constitution, couvre les auteurs, coauteurs et complices, civils comme militaires, des événements du 29 août au 4 septembre 2023, ainsi que du putsch avorté de 2019. Les infractions relevant du droit commun comme celles touchant à la sûreté de l’État sont concernées, à l’exception des crimes économiques, des violations graves des droits humains et des affaires sans lien avec ces crises. Concrètement : condamnations effacées, poursuites abandonnées, peines annulées, détenus libérés sans aucune trace judiciaire ou administrative.
Un geste politique calculé
Pour le président Brice Clotaire Oligui Nguema, l’amnistie s’inscrit dans une stratégie de rupture avec les logiques de vengeance politique et de règlement de comptes. Depuis son arrivée au pouvoir, l’ancien chef de la Garde républicaine prône un discours de réconciliation nationale et de reconstruction collective. En février dernier, lors d’un déplacement à Mitzic, il avait lui-même lâché à propos de Kelly Ondo Obiang : « Je ne saurai l’oublier en prison […] C’est mon petit frère […] Moi-même, je cherche à le faire sortir. » Des propos qui trouvent aujourd’hui une traduction concrète.
Kelly Ondo, entre symbole et controverse
Le 7 janvier 2019, lieutenant de la Garde républicaine, Kelly Ondo Obiang s’était emparé des ondes de Radio Gabon pour dénoncer la gouvernance du pays et appeler l’armée à « sauver la République ». L’opération, rapidement neutralisée, lui a valu arrestation et détention prolongée. Pour certains, il incarne un idéal de résistance ; pour d’autres, un geste impulsif ayant mis en péril la stabilité nationale. Quoi qu’il en soit, son nom restera associé à l’un des épisodes les plus marquants de l’histoire politique récente du Gabon.
Réconciliation ou pari risqué ?
Cette amnistie générale vise officiellement à « tourner définitivement la page » et apaiser un climat politique encore traversé par les fractures héritées des dernières années. Mais elle ouvre aussi une zone d’incertitude : que fera Kelly Ondo Obiang de cette liberté retrouvée ? Ralliement au projet politique d’Oligui Nguema ou prise de distance ? Dans un Gabon en pleine transition institutionnelle, la réponse pourrait peser sur l’équilibre des forces et la stabilité retrouvée.
En misant sur l’apaisement et la réintégration d’anciennes figures contestataires, Oligui Nguema confirme qu’il veut écrire une nouvelle page de l’histoire gabonaise. Une page où l’unité nationale primerait sur les antagonismes passés, mais où chaque acteur sera jugé à l’aune de ses actes à venir.
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