Libreville, le 31 Octobre 2025.
Au Palais de justice de Libreville, le Procureur général près la Cour d’appel judiciaire, Dr Eddy Narcisse MINANG, a tenu une conférence de presse devant la presse nationale et internationale au palais de justice de Libreville, le 29 octobre dernier.
Face à un parterre de journalistes , il a annoncé l’ouverture, du 10 au 14 novembre prochain, de la session criminelle spécialisée où sera examiné le dossier sensible de l’ex-Première dame Sylvie Aimée Valentin épouse Bongo Ondimba et de son fils Noureddine Bongo Valentin, poursuivis pour détournement de fonds publics, blanchiment de capitaux, complicité et recel, aux côtés de dix co-auteurs présumés.
Mais un fait majeur retient l’attention : les deux principaux accusés, actuellement en liberté provisoire à Londres depuis mai dernier, ont refusé de comparaître devant la Cour criminelle spécialisée.
Une absence qui ouvre la voie à une procédure de jugement par contumace, conformément aux articles 257 à 261 du Code de procédure pénale gabonais.
Et, selon le procureur général, « même en leur absence, le procès se tiendra bel et bien, dans la transparence et dans le strict respect des principes d’équité et de droit ».
Le jugement par contumace : une justice qui avance malgré l’absence
Le Code de procédure pénale gabonais prévoit à son article 257 que tout accusé régulièrement convoqué qui refuse de se présenter peut être jugé par contumace.
Dans ce cas, le procès se déroule sans jury, uniquement devant des magistrats professionnels, garants de la légalité des débats.
Cette disposition vise à empêcher qu’un accusé, fût-il une personnalité publique, ne paralyse le cours de la justice par son absence.
La contumace n’est donc pas une vengeance judiciaire, mais un outil de continuité permettant à la Cour de statuer sur les faits reprochés, tout en respectant les droits procéduraux du mis en cause.
Une condamnation possible, mais juridiquement réversible
L’article 258 précise que si le contumax (l’accusé absent) se constitue prisonnier ou est arrêté avant la prescription des faits, la condamnation est anéantie de plein droit et le procès doit être rejoué intégralement.
Autrement dit, le jugement par contumace n’est pas définitif : il punit l’absence, mais ne ferme pas la porte à la défense.
Ainsi, si Sylvie Bongo et Noureddine Bongo Valentin décidaient de se présenter ultérieurement, ils bénéficieraient d’un nouveau procès, où ils pourraient contester les preuves et témoigner en personne.
Mais tant qu’ils restent à l’étranger, la Cour criminelle spécialisée est en droit de juger l’affaire et de prononcer des peines exécutoires, notamment sur leurs biens situés au Gabon.
Les implications juridiques et morales d’un tel procès
Les articles 259 à 261 du Code précisent que les témoignages et preuves recueillis lors d’un procès par contumace demeurent valables, mais peuvent être réexaminés si l’accusé revient.
Le contumax supporte également les frais occasionnés par sa défaillance (article 260), sauf décision contraire du tribunal.
De plus, le recours en cassation contre un arrêt rendu par contumace est interdit à l’accusé absent.Seuls le Procureur général et la partie civile peuvent former un pourvoi (article 261).
Concrètement, Sylvie Aimée Valentin Bongo Ondimba et Noureddine Bongo Valentin, s’ils persistent dans leur absence, s’exposent à une condamnation exécutoire, à la perte de leurs droits de recours, et à une atteinte considérable à leur image publique et morale.
Leur silence pourrait être perçu comme un désaveu de la justice nationale, voire une fuite de responsabilité, dans une affaire qui concentre toutes les attentions.
Une justice gabonaise face à un test de crédibilité
En déclarant que le procès se tiendra « dans la transparence et l’équité » le Dr Eddy Narcisse MINANG a voulu rassurer l’opinion publique et les observateurs internationaux : le Gabon ne cédera ni à la pression, ni à l’inaction.
Cette position traduit une volonté ferme de renforcer la crédibilité du système judiciaire, souvent critiqué pour sa lenteur ou sa supposée complaisance envers les puissants.
Si la Cour criminelle spécialisée parvient à conduire ce procès avec rigueur, elle marquera une étape décisive dans la consolidation de l’État de droit.
Car au-delà des personnes, c’est la Justice gabonaise elle-même qui sera jugée sur sa capacité à appliquer la loi « sans distinction, ni faveur », selon les termes du Procureur général.
Entre symbole et responsabilité
Le jugement par contumace, dans le cas d’une ex-première dame et de son fils, serait un événement sans précédent dans l’histoire judiciaire du Gabon.
Il symboliserait à la fois la fermeté de la justice et sa capacité à ne pas dépendre de la présence physique des accusés.
Mais il poserait aussi une question morale : comment concilier la souveraineté du droit avec l’absence volontaire de ceux qui en contestent l’autorité ?
Une chose est sûre, ce procès, qu’il soit contradictoire ou par contumace, ouvrira une nouvelle page dans la jurisprudence gabonaise et restera gravé comme un test grandeur nature de la transparence, de l’équité et de l’impartialité annoncées par le parquet général.
Article publié par la presse judiciaire gabonaise sous la plume de Gaël BOBOUAGNO LENGA






























Discussion about this post