C’est une petite révolution qui s’annonce dans le paysage financier gabonais. Lors du Conseil des ministres du 8 septembre 2025, présidé par Brice Clotaire Oligui Nguema, le ministre d’État chargé de l’Économie, Henri-Claude Oyima, a présenté un plan de réformes qui pourrait redéfinir l’architecture du secteur bancaire et de la microfinance. Au cœur de cette refonte : la nationalisation de la fonction de directeur général (DG) des établissements financiers opérant au Gabon.
Une réponse à la fragilité du système de crédit
Le diagnostic posé par Henri-Claude Oyima est préoccupant : explosion des créances douteuses, multiplication des litiges liés au non-remboursement des prêts et vulnérabilité croissante du système. À ses yeux, le risque est clair : une déstabilisation de l’ensemble du secteur bancaire à moyen terme. Pour prévenir une telle crise, le ministre a plaidé pour une « gabonisation » des directions générales, afin de mieux aligner la gouvernance des établissements sur les réalités locales.
Une mesure de souveraineté économique
Concrètement, seuls les ressortissants gabonais pourraient désormais occuper les postes de DG de banques, de microfinances et d’autres institutions financières établies sur le territoire national. Toute exception à cette règle devrait être validée par le Comité National Économique et Financier (CNEF), instance de régulation stratégique.
L’objectif affiché est double : renforcer la souveraineté économique et accroître la sensibilité des dirigeants financiers aux enjeux locaux. « Trop souvent, les directions importées se sont révélées déconnectées des réalités gabonaises », confie une source proche du dossier.
La microfinance au centre de l’inclusion
La mesure prend tout son sens dans le secteur de la microfinance, vital pour l’inclusion des populations modestes. En réservant la direction aux Gabonais, le gouvernement espère lutter plus efficacement contre les mauvaises pratiques, corruption, retards administratifs, favoritisme, qui freinent encore le développement du crédit populaire.
Des garanties de transparence et de contrôle
Le plan du gouvernement ne s’arrête pas à la « gabonisation » des postes stratégiques. Des audits obligatoires, une surveillance accrue et des incitations à la transparence viendront compléter la réforme. L’idée est d’instaurer un climat de confiance, aussi bien pour les déposants que pour les investisseurs.
Un pari risqué, mais assumé
Pour les observateurs, cette orientation reflète une volonté politique claire : réduire les influences extérieures jugées responsables d’une partie des dérives passées. Mais certains experts mettent en garde contre un effet pervers : la fuite de compétences internationales et un risque de fermeture vis-à-vis des investisseurs étrangers. « La gouvernance locale ne doit pas rimer avec repli. L’équilibre sera difficile à trouver », prévient un banquier régional.
En lançant cette réforme, le gouvernement Oligui Nguema s’inscrit dans une logique plus large de préférence nationale et de souveraineté économique – déjà illustrée par les annonces récentes dans le secteur pétrolier. La nationalisation des postes de direction bancaire pourrait ainsi devenir l’un des marqueurs les plus forts de la Ve République gabonaise.































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