Ce 29 août 2025, la cité de Tchibanga, nichée entre forêts denses et rives majestueuses du fleuve Nyanga, est devenue l’épicentre de la mémoire collective gabonaise. Deux ans après le « coup de libération » du 30 août 2023, le président Brice Clotaire Oligui Nguema a choisi ce décor hautement symbolique pour s’adresser à la Nation. Un discours qui, au-delà de la commémoration, s’est voulu un acte de foi en l’avenir, une feuille de route pour la souveraineté totale et un rappel de l’héritage historique qui fonde l’identité gabonaise.
Un hommage à la bravoure et à la mémoire collective
Le président a ouvert son allocution en saluant les membres du CTRI, artisans du changement politique intervenu deux ans plus tôt. Leur action, a-t-il rappelé, fut guidée non par des ambitions personnelles, mais par « l’amour profond de la patrie » et par une volonté de « restaurer la dignité confisquée du peuple gabonais ». Ce rappel, fait depuis la terre de Nyanga, a pris une dimension particulière : cette région est marquée par des luttes historiques de résistance.
Le chef de l’État a évoqué avec force le nom de Nyonda Makita, figure emblématique de la lutte contre l’oppression coloniale. Pour Oligui Nguema, l’esprit de ce guerrier résonne encore aujourd’hui comme une invitation à refuser toute nouvelle forme d’asservissement, qu’elle soit politique, économique ou culturelle. « Comme Nyonda Makita, qui refusa de plier devant l’envahisseur, nous devons aujourd’hui refuser de nous plier devant toute forme moderne de servitude », a-t-il déclaré, rappelant que l’indépendance d’un peuple ne se limite pas à un acte fondateur mais se cultive dans une vigilance permanente.
« Gabon d’abord » : la préférence nationale comme doctrine politique
Le discours de Tchibanga a également été marqué par une insistance sur le concept de « Gabon d’abord », présenté comme le fil conducteur de la Cinquième République. Ce principe, loin de se limiter à une simple devise, doit, selon le président, s’incarner dans des politiques publiques concrètes. Qu’il s’agisse de l’accès à l’emploi, du respect des droits sociaux ou de l’égalité des chances, Oligui Nguema a rappelé que la préférence nationale n’est pas une négation des engagements internationaux du pays, mais une affirmation de la primauté de l’intérêt des Gabonais dans la redistribution des richesses et des opportunités.
Il a insisté sur l’urgence de rétablir la justice sociale et de mettre fin à l’exploitation abusive des travailleurs gabonais par certaines entreprises étrangères qui ne respectent ni les lois ni la dignité humaine. La Constitution, les conventions internationales et la législation nationale, a-t-il martelé, doivent désormais être appliquées avec rigueur pour garantir à chaque Gabonais sa place dans la construction du pays.
La souveraineté économique : condition de l’indépendance réelle
Au cœur du message présidentiel, la souveraineté économique a occupé une place centrale. Pour Oligui Nguema, l’indépendance politique sans assise économique n’est qu’une façade. « Nous ne serons plus des exportateurs de matières premières, mais des producteurs de richesses transformées », a-t-il affirmé, soulignant l’urgence de rompre avec la dépendance structurelle aux marchés extérieurs.
Cette orientation implique un changement radical du modèle économique gabonais : transformation locale du bois, du manganèse, du pétrole et des produits agricoles ; création d’industries capables de générer des emplois qualifiés ; stimulation d’un entrepreneuriat national compétitif. Le président a précisé que cette ambition n’est pas une option, mais une nécessité pour garantir la souveraineté alimentaire, énergétique et financière du Gabon.
La modernisation des forces de défense et de sécurité
Si l’économie fut au centre, la sécurité n’a pas été oubliée. Oligui Nguema a annoncé un vaste programme de modernisation et de renforcement des capacités des forces de défense et de sécurité. Objectif : garantir l’intégrité du territoire, protéger les frontières et assurer la stabilité interne.
Le président a promis d’augmenter le budget alloué à ces forces pour les doter d’équipements modernes et d’une formation de pointe. Cette annonce traduit une vision où la sécurité nationale n’est pas dissociée du développement économique : un pays vulnérable militairement ne peut espérer bâtir une économie souveraine.
Une unité nationale comme levier de transformation
Enfin, le discours s’est conclu par un appel vibrant à l’unité. « L’heure n’est plus aux divisions stériles dont se servent les ennemis de notre souveraineté », a lancé Oligui Nguema, exhortant les Gabonais à dépasser les querelles partisanes pour bâtir un projet collectif.
Patriotisme, unité, sacrifice et paix : telles sont les valeurs cardinales qu’il a mises en avant, affirmant qu’elles constituent le socle sur lequel doit reposer la Cinquième République. À Tchibanga, devant le fleuve Nyanga qui relie symboliquement les provinces et irrigue la terre gabonaise, le président a voulu projeter une image forte : celle d’un pays qui, fort de son passé et de ses héros, se prépare à conquérir sa souveraineté totale.
Les festivités qui suivront, parade militaire, célébrations populaires, hommages aux héros, ne sont que la continuité d’un moment d’histoire : la réaffirmation de la volonté du Gabon de rester maître de son destin.
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