C’est un virage historique, un pari stratégique aux allures de révolution économique. Ce 30 mai 2025, lors d’un Conseil des ministres extraordinaire, le président Brice Clotaire Oligui Nguema a annoncé une mesure qui pourrait transformer en profondeur le paysage industriel gabonais : l’interdiction totale de l’exportation du manganèse brut à compter du 1er janvier 2029.
Dans un pays longtemps prisonnier d’un modèle extractiviste où les richesses minières quittent le sol national à l’état brut, cette décision marque la fin d’une ère et le début d’une autre, placée sous le sceau de la souveraineté économique, de la transformation locale et de l’industrialisation endogène.
« Une mise en œuvre progressive mais irréversible »
Deuxième producteur mondial de manganèse, le Gabon dispose d’un levier stratégique qu’il n’entend plus brader. « Par cette décision historique, le Président de la République engage résolument le pays sur la voie d’une politique industrielle ambitieuse », souligne le communiqué final du Conseil. Objectifs : créer des chaînes de valeur locales, booster les emplois qualifiés, renforcer les recettes fiscales et inscrire durablement le pays dans la carte des puissances industrielles africaines.
Conscient des défis logistiques et techniques que représente une telle transformation, une période de transition de trois ans est prévue dès 2026. Celle-ci permettra aux opérateurs miniers de s’adapter, investir dans des unités de transformation et former des ressources humaines locales à la hauteur des ambitions nationales.
Un cap clair, un leadership affirmé
Depuis son arrivée à la tête de l’État, Oligui Nguema n’a eu de cesse de rappeler son cap : un Gabon moins dépendant, plus fort, et pleinement acteur de son destin économique. Cette interdiction programmée du manganèse brut s’inscrit dans cette dynamique de rupture : « L’urgence, la responsabilité et l’ambition » ont guidé cette réforme, a-t-il martelé en Conseil.
Il ne s’agit pas simplement de contraindre les multinationales à revoir leurs plans d’exploitation, mais de stimuler un écosystème local autour du manganèse, favoriser l’innovation technologique, doper la compétitivité nationale, et assurer une redistribution plus juste des richesses minières.
De l’exportation brute à la maîtrise des chaînes de valeur
En imposant la transformation locale, le Gabon change de statut : de simple fournisseur de matières premières, il entend devenir producteur de matériaux semi-finis et finis, capables d’alimenter l’industrie mondiale, notamment dans les secteurs stratégiques de la transition énergétique et des batteries.
Ce positionnement ouvre la voie à des investissements structurants, à la création de clusters industriels et à une montée en compétences de la jeunesse gabonaise, notamment dans les domaines de la métallurgie, de l’ingénierie et de l’économie circulaire.
Un signal fort à l’Afrique et au monde
La décision du président Oligui Nguema est aussi un signal adressé aux partenaires internationaux et à ses homologues africains : le temps est venu de renverser les paradigmes postcoloniaux. L’Afrique ne peut plus se contenter d’être un grenier de ressources brutes ; elle doit devenir un continent de transformation, de technologie et de savoir-faire.
Le Gabon ouvre ainsi une brèche dans le modèle extractiviste dominant, et trace les contours d’une nouvelle voie : celle de la dignité économique, de la valorisation des talents locaux et de la maîtrise de son destin industriel.
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